A l’instar de Ben-Hur, Spartacus marque une certaine rupture dans le monde du péplum. Il se situerait à mi-chemin entre le Déclin de l’empire romain et Gladiator. D’ailleurs, certaines bonnes recettes de Kubrick ont été empruntées par Ridley Scott (Gladiator). A mi-chemin pour une question de discursivité, d’abord. En effet, les répliques d’acteurs sont quand même moins policées et moins vieillotes que dans les péplums classiques. Ensuite parce qu’à l’écran il y a une impression de plus grande massivité des personnages. En clair, il y a plus de monde à l’écran. Mais cette rupture n’est pas une révolution en-soi puisque comme dans les péplums classiques il y a plus de dires que d’actions. Ceci dit, avec Kubrick, on a un certain dépoussiérage de l’univers du péplum. Et c’est tant mieux !

Le scénario tient dans un dé à coudre : Spartacus, esclave parmi les hommes libres romains, se révolte et défie la toute-puissance du sénat et de ses légions.

Kubrick a dépoussiéré les codes du péplum, mais avec retenue. Je m’explique…Il a respecté les codes cinématographiques de son époque, bien qu’il était visionnaire et en avance sur son temps. Pas de sang à l’écran, puissance de la verbalistique, dialectique au service d’un vrai fond historique. Les manques de l’histoire, Kubrick les comble comme il peut, et il a bien fait car rien ne paraît grossier à l’écran. Et puis dites vous que faire un film sur la révolte de Spartacus n’est pas facile, car il y a peu de sources historiques fiables. Les Romains n’aimaient pas parler des esclaves, encore moins en parler en bien et avec véracité. Car dans le monde romain l’esclave doit être au service des hommes libres, il doit être un simple « outil ».

Mais Kubrick a bien fait les choses. Il introduit de la poésie et de la romance dans la relation entre Spartacus et une esclave. Il nous offre sur un plateau des personnages historiques qui ont vraiment existé. Et quand il doit mettre ces personnages à la parole, il imagine avec aisance ce qu’ils se dirent peut être pendant cette crise romaine que fut la révolte de Spartacus. Il y a alors une immersion dans les luttes politiques au sein du sénat de Rome, dans les luttes d’influence entre les sénateurs et l’aspirant dictateur Marcus Licinius Crassus. Le sénat tente de trouver une solution à cette crise autrement qu’en cautionnant une potentielle dictature de ce Crassus. Crassus est dépeint comme ambitieux et tout-puissant (normal, car on peut vraiment dire qu’il avait assez de sou pour corrompre certains politiques et pour se doter personnellement en légions romaines). Pour conclure je dirai que Spartacus est le personnage important du film, dépeint avec historicité mêlée à des idéaux nobles, mais que la vraie force du film n’est pas là, elle est véritablement dans la description des Romains. L’immersion dans le monde politique romain et ses luttes d’influence et intestines est vraiment d’une réussite totale. Les blas blas propres aux péplums classiques ne s’immiscent jamais outre mesure. Un grand péplum ! Kubrick tourna peu, certes, mais quand il a une idée derrière la tête, il peut beaucoup pour le cinéma. Il s’attaquait pourtant à un genre cinématographique auquel il était étranger. C’est la marque des grands cinéastes-auteurs !

Jeu d'acteur

Kirk Douglas :):):):(