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Mongol (Sergeï Bodrov -avr08)

Publié le

Plus d'infos sur ce film

Mongol est l’ascension du grand Gengis Khân, le seul homme qui n’ai jamais réussi, de tous temps, à faire trembler la grande Chine impériale. Le passionné d’histoire ne peut qu’apprécier cette fresque, cette épopée solitaire d’un petit homme courageux devenu le plus grand des Mongols. Un film magnifique de cruauté, de mœurs rudes et d’effort personnels au milieu d’un monde terriblement hostile. Les steppes désertiques, venteuses, rocailleuses et arides de Mongolie, un sol qui n’autorise que le nomadisme, l’usage des armes et le courage comme ultime survie.


Pitch                                            
On est au XIIè siècle, dans les steppes de Mongolie. Le jeune Temudjin voit son père assassiné (futur Gengis Khân, campé par Tadanobu Asano), et est menacé de mort par le nouveau Khân de la tribu voisine. Il a trop parlé, ce Khân lui veut la mort, et la lui réservera lorsque la coutume le lui autorisera, c'est-à-dire lorsque ce jeune sera devenu grand. Pourchassé, capturé, Temudjin se libérera avec malice et force morale. Il devra se replier de toute vie de groupe pour rester discret et permettre à sa mère de rester saine et sauve. Il apprendra à dormir sous la foudre, sous la pluie torrentielle. Jusqu’à ce que l’éducation qu’il s’était donné pour lui-même, avec rigueur, il la donne à ceux qu’il croise. Il en fera des guerriers pleins de moralité, qui n’auront ni foi ni autre loi que lui, leur chef de clan. Il leur transmettra certaines vertus vis-à-vis des femmes et des enfants. Il décidera de se venger face à la tribu qui l’opprima étant jeune. Son éducation et son sens du devoir feront le reste. Avant que tous les Mongols ne comprennent ce qu’il peut représenter pour eux tous, il leur montrera qu’il est possible de braver la foudre !
Mongol mérite un grand respect ! Sergeï Bodrov atténue ses lacunes scénaristiques par le sensationnel de son personnage principal : Gengis Khan, le guerrier et empereur qui unifia les tribus mongoles autour de son charisme, qui leur donna les mêmes lois pour tous, et qui sema jusqu’aux portes de Chine et d’Europe un ouragan de terreur, en parcourant plus de kilomètres qu’aucun autre conquérant ne l’avait fait, et ne l’aura fait depuis. Mongol ne relatera pas ces moments de conquête effrénée, ces poussées sanguinaires vers l’Ouest, vers l’Est. Ce film décide de traiter de l’enfance d’un chef, d’un futur grand chef, et de le suivre jusqu’à ce qu’il unisse toutes les peuplades mongoles, disséminées aux quatre coins du désert de Gobi, des plateaux fortement venteux et de la steppe aride et salée. Le propos est de montrer Gengis Khân jusqu’à l’âge où il a embrassé toutes les forces humaines vivant en Mongolie. Le temps des conquêtes mondiales fera peut être l’objet d’un prochain opus. On l’espère !!
Un rêve de petit garçon que de voir un enfant au père assassiné, devenir le chef de près de 200 000 guerriers. Un rêve d’historien que de voir cet homme donner aux siens des lois que seul un homme ayant un siècle d’avance aurait osé imposer pour tous. Terre ravagée, sol hostile, la Mongolie est un monde d’hommes, où l’on doit se solidariser avec des guerriers et gardes du corps, qu’il faut contenter en butin. Un butin qui nécessite des pillages, une fuite en avant perpétuel. On pille la tribu voisine de ses chevaux, de ses femmes, de ses armes, de ses vêtements et tentes, pour devenir plus fort et s’assurer de survivre en cas de défense face à d’autres tribus elles aussi tenues par un Khân. Parmi ces Khâns, ces chefs de clans, un homme va s’élever au-dessus de tout. Il va unifier tout le monde grâce à son charisme. Il donne à ses guerriers la plus grosse part des butins qu’il amasse. Il ordonne et fait respecter la coutume de ne jamais frapper, violer ou tuer les femmes et les enfants.

Un grand homme, noble d’esprit, qui justement avait quelque chose comme un siècle d’avance sur les mentalités de son temps.

Il va surprendre par ses victoires militaires. Ses stratégies militaires permettant l’économie du sang des hommes, ces derniers le servent encore et toujours, trouvant en ce chef quelqu’un qui les respecte enfin comme les moteurs d’un empire en marche, une force gigantesque en mouvement, en croissance. Un empire est en train de naître, et la rugosité de la vie mongole fera que cet empire aura tout appris en s’unissant, et que rien ne sera plus jamais capable de le faire vaciller. Des pilleurs, les chevaux les plus rapides au monde, les cavaliers archers les plus habiles et véloces que la terre n’ait jamais porté, un chef grand stratège. L’empire mongol allait faire trembler le monde connu, le temps de la vie d’un homme unique et irremplaçable : Gengis Khân, dont la mort sera celle de cette grande épopée de conquêtes, inégalée depuis. Ses fils se déchireront mutuellement. Seul le charisme du père pouvait faire quelque chose. Sa mort le mythifiait pour longtemps comme celui qui en l’espace d’un demi-siècle avait bâti la plus grande force militaire que le monde n’ait jamais connu. Le maître de la plus grande décharge de cavalerie au monde, des chevaux qui allient la vitesse à l’endurance.

L’émerveillement prend très vite, dans ce film. La beauté du monde sauvage. Ces plaines au coucher du soleil, cette eau qui tombe une fois pour toute, pour ne plus revenir avant longtemps. Ces rocs et ces sables à perte de vue dont la seule vie est celle de leur mouvement provoqué par le souffle du vent. Cette terre incultivable parce que plus forte que l’Homme ! Au milieu de cet enfer, des hommes et des femmes costumés comme rarement, survivent et accrochent le regard du spectateur. La beauté singulière des femmes, leurs yeux perçants, leur rudesse ! Ces chevaux, éternels tenants de la nature apprivoisée par l’homme, si trapus, si véloces ! Ces torches de flamme jetées contre les tentes, dont la rougeur se mêle à un jaune vif aux contours sauvages et irréguliers. Ces batailles rangées ont personne ne connaît encore la poudre, mais fait parler l’acier jusqu’à la mort du dernier adversaire. Et derrière, toujours derrière, ces caravanes emplies de femmes et enfants, qui attendent que leurs maris reviennent du front, ou jamais !
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La colonne vertébrale du film est ce personnage principal, Tadanobu Asano, acteur japonais qui campe Gengis Khân. Ce n’est pas une question d’interprétation mais de posture, de comportement devant la caméra. Car chez tous les personnages, les paroles sont lapidaires. La Mongolie d’alors est un monde de solitaires, où l’on croit percevoir des animaux, alors que ce sont des hommes, des femmes et des enfants qui s’entretuent pour survivre. Leur monde, leur territoire est un enfer. Nulle survie pour celui qui n’est ni robuste, ni valeureux ni audacieux. La bestialité de certains comportements, de certains propos sont donc à remettre dans ce contexte : nous sommes au XIIè siècle, sur un sol terriblement ingrat qui fabrique des créatures du monde sauvage au détriment d’hommes aussi civilisés que dans la France du Moyen-Age. Tout simplement parce que pour qu’il y ait homme civilisé, il faut littéralement qu’il y ait « la vie en cité ». Point de cités, point de villes en Mongolie. C’est le nomadisme !
Mongol envoûte les sens, car il a ce double atout de croiser la singularité exemplaire et charismatique d’un seul homme, Ghengis Khân, avec l’universalité des besoins primaires de l’Homme. Ici, on y est confronté, car personne aujourd’hui, dans notre monde illusoire et confortable d’occident, ne serait capable de vivre pareillement. Mongol s’apprivoise comme un film magnifique de cruauté, dès lors que l’ont fait l’effort de se dépouiller de toute la routine de sa vie. Mais c’est ça aussi le cinéma, même si Mongol est un film rare…

Kulan Chuluun, campe la femme de Gengis Khân. Un visage qu'on n'oublie pas !


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