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Into the Wild (Sean Penn -2008)

Publié le

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Sean Penn, Eddie Vedder (Pearl Jam), Emile Hirsch et Eric Gautier ont, à eux quatre, réalisé un formidable objet de cinéma. Ode à la solitude et victimisation virulente de la société aseptisée néo-capitaliste, Into the Wild raconte l’histoire vraie d’un idéaliste, qui ayant accepté jusqu’à son diplôme de fonctionner selon les règles de ses parents, décide de tout plaquer pour mener son corps et son esprit jusqu’en Alaska.

 

Emile Hirsch. Paramount VantageChristopher McCandless (Emile Hirsch)  empruntera en 1990 une marche d’est en ouest, puis du sud au nord-ouest des Etats-Unis, avant de s’aventurer dans le grand Alaska. Découpant sa carte de crédit, brûlant les traces de son passage parmi les consommateurs du capitalisme, il se baptise lui-même comme apte à se lancer là où le mènent ses idées. Des idées sur tout, surtout des idées qui font de lui un idéaliste, c’est-à-dire forcément seul à dire tout fort ce que tout le monde pensent. Plus il avance, plus il rencontre de nouveaux êtres qu’il surprend, et qu’il aime à surprendre.


Se gargarisant du regard approbateur des êtres qu’il rencontre, cet égaré devient un bandit de grand chemin à l’encontre de lui-même : se coupant de ses origine, il pense obtenir une planche de salut pour ses idées d’un nouveau genre…pour un nouveau monde. Un monde où, au bout du compte, il finit de plus en plus seul, de plus en plus livré à lui-même, corvéable de ses idées et idéaux.

Emile Hirsch. Paramount VantageSean Penn réussit avec son directeur-photo, Eric Gautier, un véritable champs de force autour du scénario. Les grands espaces deviennent des symboles de liberté puis des pièges aussi mystérieux que ces chouettes que le jeune idéaliste ose affronter d’un regard persistent. La voix off du jeune homme, concentrée en messages forts, vient habiller puissamment un fond de scénario parfaitement autonome. Sean Penn prouve une fois encore que son cinéma à lui, est celui du militantisme qui ne s’impose pas de lui-même, mais se pense, se vit. A ce titre, son Into the Wild ne garde certes pas ses idées pour lui, mais il ne les impose pas aux spectateurs. Mais ce n’est pas non plus un film contemplatif ou passif.

Les rencontres sont ce qu’elles sont, notamment ces hippies dont il ne peut éviter l’écueil, au cœur du long-métrage, mais elles ne sont pas imposées non plus. Le montage fait en sorte que les instants de rencontres desservent en bout de course, en bout de plan-séquence, une idée sur cette nouvelle vie que tout le monde rêverait pour eux, mais n’osent avouer aux autres. Lui, cet idéaliste le dit haut et fort lorsque la rencontre lui semblera sincère, mais cette dernière restera elle-aussi sans aucunes traces de son passage. Il efface tout derrière lui, s’enfermant dans ses idéaux qui rendent admiratifs le peu de gens qu’il croise, et pensera être gargarisé pour affronter le grand Nord.

Jena Malone et Emile Hirsch. Paramount VantageUne région où son avenir n’aura strictement rien avoir avec le moule aseptisé qui a déjà brisé la liberté morale de ses parents. A ce titre, vivre selon leurs vœux, leurs désirs, ou encore vivre comme eux l’ont fait, serait, semble-t-il une souffrance aussi inutile que terrible pour ce jeune Christopher McCandless, qui a déjà tout plaqué, et qui s’est refusé à la grande Harvard : terrible moule aseptisant les futures élites des USA.

Avec l’Alaska autour de lui telle une prison dorée, son idéalisme le condamne à la solitude, celle des miséreux vivant seul pour devenir plus fort. Chose à différencier irrémédiablement de la marginalisation. A ce titre, Sean Penn appuie sur cette difficulté de ne jamais vraiment pouvoir saisir son destin, qui lorsqu’il est jalonné d’êtres rencontrés, peut rendre aveugle au point de se perdre soi-même hors des sentiers battus.

 

Emile Hirsch. Paramount VantageSoufflent alors sur Into the Wild les grands vents de Jeremiah Johnson, comme le grand air libertaire de Easy Rider était soupçonnable dans son début de parcours initiatique. Se suffire à soi-même : l’ultime pied-de-nez à une société de consommation qui selon le jeune homme, marche sur la tête. Le rêve peut tout aussi bien devenir un cauchemar. Le vécu de Jeremiah Johnson est là pour rappeler que Dame Nature ne s’apprivoise jamais, car c’est elle qui nous dompte tous ! Eddie Vedder, le chanteur à la voix rocailleuse de Pearl Jam, prends alors toutes ses aises, pour conter une ode à la solitude empreinte de sagesse de l’esprit, mais point du corps…

Voyez et écoutez par vous-même, dans cette extrait :

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K
Vivre avec le systèmeTu vois les choses comme moi, Epona.<br /> Et peut-être voyons nous ce film comme Sean Penn voulait qu'on le voit : le système de consommation ne se quitte pas comme cela, et pour le changer il faut vivre avec ses défauts pour les améliorer, agir sans ou contre n'était pas souhaitable...<br /> Merci Epona d'apporter un débat constructif à ma critique !
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E
un beau film, comme un beau rêveQui n'a jamais eu envie de tout quitter? de s'isoler de la société et de ses méandres? <br /> Envie d'être seul avec soi-même, en tête à tête avec la nature...<br /> Ce film fait rêver, avec ses plans des grands espaces sauvages, mais ramène aussi les pieds sur terre. <br /> Finalement le bonheur n'est-il pas de vivre ensemble, d'être aimé et aimer, tout en restant soi-même?<br /> <br /> Un film magnifique, qui fait réfléchir.<br /> Très belle critique Keruit.<br /> epona
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