Avant-goût : Gladiator est un Spartacus ou un Ben Hur relifté. Il copie les bons points qui avaient fait de ces deux films des monuments de péplum pour ensuite mieux appuyer sur une dialectique action/drame. Cette dialectique devient alors surpuissante et ultra-performante. Spartacus alliait le drame à la poésie des sentiments, avec des scènes d’action monumentales pour l’époque, mais qui ont quelque peu vieillis. Mais là, avec Gladiator, place à du très grand spectacle, du sang à l’écran, les meurtres ne restent pas en filigrane du scénario et se font au contraire en direct live. A noter que le scène de la bataille rangée –scène d’entrée de film- est monumentale sans toutefois égaler le savoir-faire de Mel Gibson pour son Braveheart.

Pitch : le général romain Maximus (Russell Crowe) devient esclave, d’esclave il devient gladiateur, gladiateur il défie un empereur (Joaquin Phoenix)…

Une scène : le coup du Maximus tuant 4 prétoriens est un peu gros car ils représentaient l’élite des soldats romains. Mais ça fait plaisir à voir quand on sait combien les prétoriens étaient les lèches-bottes des empereurs. Autre scène : Commode va défier Maximus au milieu du Colisée, ils se font hisser jusqu’au sol de l’arène par un monte-charge, le tout sur une musique orchestrale des plus impressionnantes (musique de Hans Zimmer) ! Grand moment de cinéma qui s’annonce et qui se confirme à l’écran ! Quel duel ! La vengeance va-t-elle s’exercer ?

Avis : la 1ère partie de film pose les jalons de ce qui fera la très grande puissance de la seconde partie de Gladiator. Cette 1ère partie nous transpose habilement à l’époque romaine, dans des décors romains très crédibles (on s’y croirait), avec des dialogues au langage soigné et soutenu (pas trop quand même je vous rassure), des personnages charismatiques (dont l’empereur Marcus Aurélius, son fils Commodus, sa fille Lucilla et biensûr l’honnête, valeureux et juste général Maximus). On rentre d’un très bon pied grâce à une bataille entre Romains et Germains somme toute puissante à l’image. Après quoi on entre de plein pied dans l’univers de Marc Aurèle, et dans les rouages du pouvoir et ses luttes intestines dès lors que Commodus entre en scène. On soupçonne une lutte parricide entre Marc Aurèle et son propre fils pour gouverner Rome. Le décor à la romaine se pose alors et le langage, bien que soutenu, reste facilement abordable et reste loin de répliques purement théâtrales.

 Le tournant du film se situe lors de la mort de Marc Aurèle. C'est-à-dire après que Commode lui ait fait étalage de ses vertus. Hélas, celles-ci n’étaient pas les vertus cardinales. Désolé l’ami ! Le dévouement pour sa famille n’est pas une vertu typiquement romaine, le dévouement doit se tourner vers l’unique Rome, l’entité toute-puissante. L’ambition ne doit pas corrompre le devoir de justice morale. Quant au courage, il doit avant tout s’exercer sur les champs de bataille. Ambition, dévouement pour sa famille et le manque de courage n’ont jamais été à la cheville des vertus cardinales romaines. Tempérance et justice morale sont deux de ces vertus cardinales, or, Commode, tu ne sembles avoir aucune tempérance ni aucune justice morale lorsque l’on te voit tuer ton propre père pour gouverner. Mince, Marc Aurèle est mort, voilà Maximus dans de beaux draps, lui qui avait les faveurs de Marc Aurèle…

 Si les scènes de combat sont réussies, bien que parfois filmées trop rapidement, la vraie force du film réside dans les dialogues et le jeu d’acteurs. On suit Maximus dans un passage difficile de sa vie : son esclavage. Les dialogues transpirent cet idéal de bien des gladiateurs de passer du monde des non-libres au monde des hommes libres. Les tests que font subir les sénateurs au jeune Commode servent à lui montrer que Rome ne se gouverne qu’avec et seulement avec le sénat.

 

Si la 1ère partie du film est réussie, la seconde partie devient un chef d’œuvre puisqu’elle reprends les éléments moteurs de la 1ère partie pour pousser le diptyque action/drame dans ses derniers retranchements. La dramatisation se tend à l’extrême. On est alors scotché et pris par Gladiator. On se dit alors que si Commode est au pouvoir, il sait que son défunt père lui a fait un enfant dans le dos : Maximus.

 

La version longue comporte plusieurs scènes qui n’apportent rien niveau action, désolé pour les fans de bataille et de combat. Mais ces scènes supplémentaires font dégager une dimension plus politique du film. Et ça c’est génial. Commode est ainsi dépeint comme plus dur encore. Les sénateurs apparaissent alors mieux organisés pour contrer l’envahissant Commode. Une chose est sûre, j’ai vu et revu Gladiator, et malgré cela j’ai pleuré pour la première fois devant la fin de Gladiator version longue. Cette version amène plus de dramatisation au dénouement final, c’est sûr. Mes yeux en sont doublement témoins. Ces scènes qui avaient été coupé au montage cinéma l’ont été non pas parce qu’elles étaient mal jouées ou mal filmées, mais parce qu’elles cassent quelque peu le bon rythme du film. C’est tout. Trois scènes rajoutées valent de l’or. Les 20 dernières minutes sont phénoménales avec une dramatisation dont je ne connais pas de semblable au point de vue émotionnel.

Jeu d’acteurs : Quel charisme ce Richard Harris (Marc Aurèle). Maximus est campé par un Russell Crowe épatant et qui finira par crever littéralement l’écran à mesure que le film avance. Connie Nielsen (Lucilla) est d’une pureté saisissante, d’une beauté contrôlée mais puissante. Elle joue plusieurs registres dont la souffrance et la fermeté devant son empereur de frère, l’amour dissimulé et refoulé pour un Maximus qu’elle admire. Commode nous laisse petit à petit antipathique mais il joue bien l’ambitieux et le sournois ce Joaquin Phoenix.

Russell Crowe ****

Joaquin Phoenix ****

Richard Harris ****

Connie Nielsen ****Connie Nielsen. United International Pictures (UIP)