Mean Streets (Martin Scorsese -1976-)
Avant-goût difficile daccrocher vraiment à cette première uvre phare de Martin Scorsese. Dans le fond dintrigue il manque de la profondeur, il manque même une trame. Mais on peut remarquer déjà les atouts techniques qui feront la force de la réalisation scorsesienne : le rythme de la caméra, le travelling avant et arrière, le cadrage voyeuriste..
Pitch en 1973, à New York, dans la petite Italie, Johnny Boy et Charlie, des malfrats à l'affût de combines louches, côtoient les mafiosi qu'ils envient. Pour accéder au haut du pavé, une règle impérative : respecter la loi d'honneur du milieu. Charlie, lui, a ses chances, car il a un oncle mafieux. Mais le problème se pose pour Johnny, un bagarreur inconscient, criblé de dettes. Lorsque celui-ci se procure une arme à feu et commence à faire le malin, ça dérape...
Avis heureusement quil y a un super duo dacteurs dans Mean Streets, sinon cette sorte de trou dair scénaristique serait très, très mal passé. Le jeune De Niro et le jeune Harvey Keitel bonifient énormément le film, notamment parfois en numéro dimpro (la scène de larrière-bar près des poubelles). La légende de Mean Streets, et ce mythe fondateur quil représente pour la carrière de Scorsese se résume en fait à cette interprétation de De Niro, dont Keitel peine à se rapprocher. Mean Streets nest pas seulement le lancement grand public de la carrière de Robert de Niro, cest aussi le début dune filmographie mafieuse convaincante chez Scorsese. Il faut faire la part des choses tout de même : Scorsese entame là par un film sur des petites frappes de Little Italy (quartier italien de New-York), c'est-à-dire bien loin des vrais gangsters quil mettra à lécran par la suite (Affranchis, Casino). Alors bien évidemment, filmer les déambulations quotidiennes de telles petites frappes na rien denthousiasmant. Ce serait presque un raté complet sans cette caméra énergique ou cette paire dacteurs. Scorsese risquait le non-film. Car sils ne sont pas de vrais durs, ils ne sont pas non plus identifiables comme monsieur tout le monde. Leurs problèmes existentiels nintéressent personne, faute dune mise en valeur réelle par Scorsese et faute dun scénario faisant du surplace. Ce sont des banalités existentielles que Scorsese fait tourner en boucle. Scorsese rate en effet le portrait humaniste de son milieu denfance. Bien heureusement, le sens du rythme déjà féroce de Scorsese, lui permet de sauver cet échec de filmer lhumain. Via quatre bastonnades filmées en travellings avant et arrière enthousiasmants, via cette fraîcheur de Keitel et De Niro et via une bande-son authentique (bande-son interne en fait, soit une radio, un tourne-disque à disposition des acteurs, soit la musique du lieu central : le bar de nuit), Scorsese rend une très belle copie. Par contre, une très belle copie en tant que réalisateur (sens du rythme, technicité) mais non en tant que cinéaste, reconnaissance quil devra encore attendre. Mean Streets est donc selon moi pseudo-culte, parce quil a révélé une belle technique de réalisation, un bon Robert de Niro, et quil sattaquait enfin aux problèmes existentiels de la délinquance des minorités italiennes de New-York. Cest le fond qui ne suit pas assez pour se faire-valoir en film réellement culte ! On pourrait certes y voir un essai sur ce problème de délinquance de Little Italy, mais Scorsese, faute de moyens financiers, sest recroquevillé sur une caméra à lépaule économique mais inadaptée à filmer le grand espace socio-économique que représente sa Little Italy natale. Le spectateur reste trop la tête dans le guidon de la paire dacteurs Keitel/De Niro et est mené en bourrique tout au long dun surplace scénaristique. Alors chef d'oeuvre, non, car pas assez mûr, mais un petit culte peut lui être rendu pour ses moments d'improvisation, sa bande-son interne au film (une première paraît-il !), son énergie de caméra et cette révélation fracassante de De Niro !
Jeu dacteurs
Robert de Niro :):):):)
ð Bob de Niro avait là enfin loccasion de se mesurer à un vrai rôle, surtout après ses trois premiers rôles négligés par Brian de Palma. Cette légèreté teintée de grave va malheurseument disparaître au fil des années chez De Niro. On regrettera la sobriété vers laquelle s'est parfois embarqué l'acteur depuis, qui est sans nul doute du au souci de travailler ses rôles avant les débuts de tournage, ce qui est maladroit car ça semble brider son talent naturel hérité du fameux théâtre de Broadway, où il se mesurait sur ces planches bourgeoises et satinées... à un autre jeune loup aux dents longues : Al Pacino.
Harvey Keitel :):):):(
ð un peu trop linéaire dans son interprétation, ni de faiblesses, ni de forces, mais un manque détincelles